pour guenrikh levine
- Le contraire du jeu
- 14 juil. 2021
- 2 min de lecture
À propos de son inclination
pour Chourochka Lioubarskaïa
Il est désagréable
de se noyer dans l'océan.
Les poissons nagent dans les poches,
le chemin est flou devant.
Alors pourquoi, toi, malheureux,
es-tu tombé dans l'océan des passions
et n'es-tu plus toi-même
à cause de la merveilleuse Chourochka ?
En tout cas il n'y a aucun espoir
de réciprocité,
mieux vaudrait vers un pistolet, vite,
diriger ton rêve.
Il ne manque pas de tristes exemples
- Ne l'oublie pas -
où les chimères d'amour
conduisent dans l'au-delà.
Regarde dans le jardin,
presque sur chaque branche
restent, mélancoliques,
comme enfermés dans une cage,
nos vieux amis,
les petits insectes :
autrement dit les mouches, les abeilles
autrement dit ceux qui dans nos oreilles
fabriquent la lettre J,
ceux qui volaient et te piquaient,
toi et ta Choura,
sa luxueuse stature.
Pâle et malade,
il y a une puce,
son nom est Petrova,
pas belle à voir.
Elle s'est éprise éperdument
d'un cavalier !
Je me souviens, elle gambadait
en le désirant.
Ses yeux brillaient
sa main appelait
elle n'était pas loin du but,
cette petite dame.
Elle portait des jupes
de fin piqué,
elle écrivait des poèmes
dans la langue des puces
sur ses petites jambes et ses petites mains
sur d'autres trucs-machins
ayant trait à la volupté et au mariage...
Mais il s'est trouvé qu'en fait
notre célèbre chouchou
n'était pas un chaton mais un plouc !
Il n'y a que de l'embolie dans ses organes
que du chahut dans sa petite tête.
Il la trompe avec une fille
- charmante salope -
et après toutes ses chansons
il la traîne dans la boue.
Rien ne la passionne plus :
ni fripes, ni lingeries,
Sous le slogan TOMBE
s'éteint sa vie.
C'est effrayant de vivre dans ce monde
d'où l'agrément est absent :
le vent hurle à l'aube,
les loups dévorent un petit lapin,
Un oiseau s'envole d'un chêne,
cherchant de la viande pour ses petits,
mais la Providence, grossièrement,
lui refile des vers.
Le petit veau pleure
sous le poignard du boucher,
le pauvre poisson endormi
se glisse dans les filets du pêcheur.
Le lion rugit dans la nuit noire,
le chat gémit sur la cheminée,
le scarabée-bourgeois et le scarabée-ouvrier
trouvent la mort dans la lutte des classes.
Tout va périr et disparaître
du bacille à l'éléphant
- ton amour et les chansons,
les planètes et la lune.
Et la puce, madame Petrova
qui est assise de face,
elle est prête à mourir
et elle mourra bientôt.
Cette petite bête saute sauvagement
d'une hauteur infinie
et se casse la tête.
Toi, tu te la casseras aussi !
1930
Nikolai Oleinikov (1898-1937), traduit par Macha Zonina et Jean-Christophe Bailly.

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