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la confusion des espèces

  • Photo du rédacteur: Le contraire du jeu
    Le contraire du jeu
  • 13 mars 2022
  • 1 min de lecture

I



Il confondait la présence et l'absence,

il tournait le dos au ciel, il confondait le monde et la fin du monde


Il confondait le vol d'un corbeau et le sang qui coule,

l'abeille secrète et le vent qui l'emporte


Il marchait dans les pas de celui qui le suivait


Cliniquement, il vivait


Chaque soir, venait le vautour translucide

chercher sa vieille pitance :

son bec frappait à la vitre

Un petit tour, madame

Un sale tour, monsieur


Sa pensée tournait autour d'un jet de sang


Ses haubans serrés, ses poumons séchés

La seule joie : la rage, façon de parler


Le sang du vautour, bonjour


Vautour, de ta plus haute tour

vautour, ne vois-tu rien venir ?

Je vois des violettes dans la mousse

je ferme les yeux, je vois l'Afrique


Cliniquement, il vivait dans le ciel

mais le ciel confondait le ciel et le cœur qui battait

trop vite, trop fort, comme une vague

de mille vautours dans la marée montante


Il vivait dans une maison en flammes

tout là-haut au loin des planètes

Le ciel descendait sur la terre

se mêler aux petites bêtes


Le ciel se cachait dans les draps

on n'était pas fier


Des hommes à têtes de chien

fouillaient dans les cendres

de son avenir


Il était l'absent présent sur les lieux du crime

il tournait le dos à la mer, son corbeau sur l'épaule

le corbeau, c'est la pierre en feu, le coquillage affolé


En-haut, sous les combles, passe l'armée en sang


Cliniquement présent, il confondait tout.


Jean-Yves Bériou, La confusion des espèces, Pierre Mainard, 2018.

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