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jens august schade

  • Photo du rédacteur: Le contraire du jeu
    Le contraire du jeu
  • 18 juin 2020
  • 1 min de lecture

POÈMES DE LA GROGNASSE

(Extrait)


Ah, comme j'aimerais que ta langue ait deux mètres de long,

disait la grognasse, carabosse au groin, cette sainte truie.

Nous étions attablés, mèches folles, à écluser du café,

avec des ongles longs au bout des doigts

entrelacés. Par moments elle plongeait

son groin dans la cafetière, la noiraude,

pour en lamper le jus noir avec ivresse. – Tu pourrais

me l'enrouler autour du cou et m'en fourrer la pointe

dans la bouche, pour que nos deux langues

s'acoquinent et patinent en une fringante succion.

Zut, ça m'embête de me pencher sur la table,

avachie comme je suis, et

la langue dans mon jus, car nous avons ingurgité

un océan de café dont on ne peut mesurer le fond ;

nous n'avons pas cessé depuis avant-hier

d'écoper, de vider, de sécher ces godets, et crois-moi ou pas :

à force d'embrasser nous avons bien fait trois mille fois

le tour de la lune.

Jens August Schade, Poèmes de la grognasse, 1944. Traduit par François Marchetti.

Anthologie de la poésie danoise contemporaine, par J. G. Brandt, U. Harder et K. Rifbjerg, 1975.


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