déraisons d'être
- Le contraire du jeu
- 25 févr. 2021
- 1 min de lecture
Dernière mise à jour : 16 avr. 2023
AU NIVEAU DE L'ABSENCE
Il y a des tas de minuits fanés dans vos yeux
et des étangs de liqueur panique
où viennent se désaltérer de fragiles malfaiteurs
surpris en flagrant délit d'innocence
et la mémoire elle-même entre deux cauchemars
il y a dans vos minuits des orgues de chaleur
dont les larmes de cire
prolongent les doigts fiévreux d'une chanson
qui étrangle un par un
les rauques appels des animaux perdus
il y a sur le devant de votre vie
toutes les rides insolentes de la jeunesse
et la signature que vos lèvres déposent
au bas d'une page d'alcool
contient toute sorte d'histoires vraies
assises au chevet d'une rue presque déserte
où rôdent encore des éclats de rire
et de vastes corbeaux reniés par leur propre ciel
il y a des tas d'adieux dans votre voix
et quand vous baissez la tête
pour tousser à votre aise
on dirait que vous apprenez la mort par cœur
et quand vous partez rejoindre votre silence préféré
l'espace entier se vide de ce qui n'est pas vous
et nous laisse seuls avec votre absence fertile comme
tout
fertile comme un faire-part de suicide
ou comme l'envers d'un océan.
Georges Henein, Déraisons d'être. Éditions José Corti, 1938.
Image de Kamel Telmisany.

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