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la pseudo-émancipation des enfants

  • Photo du rédacteur: Le contraire du jeu
    Le contraire du jeu
  • 15 oct. 2020
  • 2 min de lecture

[…] La pseudo-émancipation des enfants est le parallèle exact de la pseudo-émancipation des femmes : bien que nous ayons aboli tous les signes extérieurs de soumission –vêtements particuliers et gênants, canne du maître d’école – il ne fait aucun doute que, dans le style propre du XXe siècle, le mythe de l’enfance est prospère et atteint une dimension énorme : des industries entières sont fondées sur la production de jouets spécialisés, de jeux, d’aliments infantiles, de « petits déjeuners », de livres, de bandes dessinées, de bonbons particulièrement attrayants, etc. Des spécialistes de l’analyse de marché étudient la psychologie des enfants afin d’élaborer des produits qui leur plairont selon leur âge. Il existe une industrie de l’édition, du film et de la télévision conçue pour eux, avec sa propre littérature, ses programmes, ses émissions patronnées par la publicité, il y a même des comités de censure qui décident des produits culturels propres à leur consommation. Une prolifération sans fin de livres et de revues instruit les profanes dans l’art d’élever les enfants. On trouve des spécialistes en psychologie de l’enfant, en méthodes d’éducation, en pédiatrie, et dans toutes les branches particulières qui se sont développées récemment pour étudier cet animal particulier. L’éducation obligatoire est florissante et suffisamment répandue pour former un filet serré de socialisation (lavage de cerveau) dont même les plus riches ne peuvent plus s’échapper tout à fait. Elle est bien loin, l’époque de Huckleberry Finn : aujourd’hui le tire-au-flanc et le dropout * doivent se donner beaucoup de mal s’ils veulent passer à travers l’essaim de spécialistes qui les étudient, de programmes gouvernementaux et d’assistantes sociales qui sont à leurs trousses.


* – Dropout : personne qui rejette la société actuelle, qui « laisse tomber » son rang social et ses obligations, ses études s’il s’agit d’un étudiant, pour vivre au hasard de son inspiration (ndlt).


Shulamith Firestone, Pour l'abolition de l'enfance, traduit de l'américain par Sylvia Gleadow, Tahin Party, 2016.

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